Envie

Origine

du latin invidia
voir aussi envier.
  • API : /ɑ̃.vi/
  • SAMPA : /a~.vi/

Nom commun

envie /ɑ̃.vi/ féminin (féminin pluriel : envies /ɑ̃.vi/)
  1. Chagrin et haine qu'on ressent du bonheur, des succès, des avantages d'autrui.
    L'envie, le mépris, le discord inconstant. — (Abbé Mathurin Régnier, Sat. VI.)
    La vertu n'est vertu, l'envie la déguise. — (Abbé Mathurin Régnier, ib. V.)
    L'envie avec sa trahison. — (Tristan, M. de Chrispe, III, 1.)
    La jalousie est en quelque manière juste et raisonnable, puisqu'elle ne tend qu'à conserver un bien qui nous appartient ; au lieu que l'envie est une fureur qui ne peut souffrir le bien des autres. — (La Rochefoucauld, Max. 28.)
    Il y a encore plus de gens sans intérêt que sans envie. — (La Rochefoucauld, ib. 486.)
    Est-il rien que l'envie ou n'attaque ou n'infecte ? — (Jean de Rotrou, Bélis. v, 5.)
    L'envie leur ouvrait les yeux ; c'est un démon qui ne laisse rien échapper, et qui tire conséquence de toutes choses aussi bien que la jalousie. — (Jean de la Fontaine, Psyché, I, p. 72.)
    Toute jalousie n'est point exempte de quelque sorte d'envie, et souvent même ces deux passions se confondent ; l'envie au contraire est quelquefois séparée de la jalousie ; l'envie et la haine s'unissent toujours et se fortifient l'une l'autre dans un même sujet ; et elles ne sont reconnaissables entre elles qu'en ce que l'une s'attache à la personne, l'autre à l'état et à la condition. — (Jean de la Bruyère, XI.)
    L'homme qui dit qu'il n'est pas heureux pourrait du moins le devenir par le bonheur de ses proches ; l'envie lui ôte cette dernière ressource. — (Jean de la Bruyère, ib.)
    Écoute, je connais l'envie et l'imposture ; Et quel cœur généreux échappe à leur injure ? — (François-Marie Arouet, Tancr. III, 3.)
    […] nos tyrans sont nos vices ; Le plus cruel de tous dans ses sombres caprices, Le plus lâche à la fois et le plus acharné, Qui plonge au fond du cœur un trait empoisonné, Ce bourreau de l'esprit, quel est-il ? c'est l'envie. — (François-Marie Arouet, Disc. sur l'envie.)
    On pourrait, ce me semble, représenter l'envie, égorgeant d'une main un génie vivant, et de l'autre offrant de l'encens à un génie qui n'est plus. — (Jean le Rond D'Alembert, Dial. Christ. et Descart.)
  2. Désir de jouir d'un avantage pareil à celui d'autrui.
    Que tu tombes au point de me porter envie. — (Pierre Corneille, Hor. IV, 5.)
    Qu'aux honneurs de ta mort je dois porter envie ! — (Pierre Corneille, Héracl. IV, 4.)
    Je porte peu d'envie à sa bonne fortune. — (Pierre Corneille, Œdipe, I, 3.)
    J'ai pitié de moi-même et jette un œil d'envie Sur ceux dont notre guerre a consumé la vie. — (Pierre Corneille, Horace, II, 3.)
    Et ce pays si beau […] Avec un œil d'envie est toujours regardé. — (Pierre Corneille, Cid, II, 7.)
    Jamais de tant de soins mon esprit agité Ne porta tant d'envie à sa félicité. — (Jean Racine, Iphig. IV, 1.)
    Elle ne veut pas qu'on regarde d'un œil d'envie la prospérité de son frère. — (Jean-Baptiste Massillon, Carême, Vérité de la relig.)
    Va, mort ou triomphant, tu feras mon envie. — (François-Marie Arouet, Brut. IV, 6.)
  3. Désir, volonté.
    En vain, pour satisfaire à nos lâches envies, Nous passons près des rois tout le temps de nos vies à souffrir des mépris, à ployer les genoux. — (François de Malherbe, I, 3.)
    L'avis que l'on m'a donné […] m'a fait naître l'envie et le loisir de faire cette promenade. — (Vincent Voiture, Lett. 39.)
    Vous n'avez pu former une si noble envie. — (Pierre Corneille, Pomp. III, 2.)
    Nous autres asservis à nos lâches envies, Sur des biens passagers nous occupons nos vies. — (Pierre Corneille, Imitation, I, 11.)
    Sans pouvoir satisfaire à leurs vaines envies. — (Jean de la Fontaine, Fabl. III, 12.)
    Ce que veut la raison, l'amour me le défend Et m'en ôte l'envie. — (Jean Racine, Théb. v, 1.)
    Elle implore à grands cris le fer et le poison, Vous seul vous lui pouvez arracher cette envie. — (Jean Racine, Bér. IV, 7.)
    Quoi ! vous ne perdrez point cette cruelle envie [de vous donner la mort] ? — (Jean Racine, Phèd. I, 3.)
    N'eût-il pas sans regret secondé mon envie ? — (Jean Racine, Baj. III, 7.)
  4. L'odieux d'une chose.
    De Mesmes n'avait rien oublié pour jeter sur moi toute l'envie de la collusion avec les ennemis de l'État. — (Cardinal de Retz, II, 251.)
  5. Envie s'applique aussi aux différents besoins corporels.
    Envie de manger, de boire.
    La sécheresse du gosier nous fait envie de boire. — (René Descartes, Méd. 6.)
    Nul mets n'excitait leur envie. — (Jean de la Fontaine, Fabl. VII, 1.)
    Nous avions tous envie de pleurer. — (Marquise de Sévigné, 129.)
  6. Nom donné à de petites portions de peau qui se détachent autour des ongles, et causent une assez vive douleur quand on les arrache.
  7. Nom donné à des taches que les enfants apportent en naissant, et auxquelles on s'imagine trouver de la ressemblance avec certains objets dont la mère a eu envie pendant sa grossesse.
    Les envies sont comme des nuées : on y voit ce que l'on veut. — (Charles Bonnet, Consid. corps org. Œuvres, t. VI, p. 400, dans POUGENS.)

Mots dérivés

Locutions dérivées

Mots apparentés

TraductionDéplier / Replier

Verbe

envie /ɑ̃.vi/
  1. Deuxième personne du singulier du présent de l'impératif de envier
  2. Première personne du singulier du présent de l'indicatif de envier
  3. Troisième personne du singulier du présent de l'indicatif de envier

Voir aussi