Dépit

Origine

norm. dépit, mépris ancien catalan despeit du latin despectus, de despicere, regarder de haut en bas, mépriser, de la préposition de, et spicere, regarder (voir aussi spect).
  • API : /de.pi/
  • SAMPA : /depi/

Nom commun

dépit /de.pi/ masculin
  1. Chagrin mêlé d’un peu de colère.
    M'ayant fait oublier tous les dépits qu’elle m’a faits, je ne me souviens plus que des excellentes qualités qui la rendent aimable et admirable. — (Vincent Voiture, Lett. 23.)
    Je crève de dépit. — (Molière, Préc. 17.)
    J'en ai dans le cœur davantage ; Et, pour exprimer tout, ce cœur a du dépit De ne point trouver de langage. — (Molière, Amph. II, 6.)
    De grand dépit Richard elle interrompt. — (Jean de la Fontaine, Rich.)
    Les victoires de Maurice firent mourir de dépit Chosroès. — (Jacques-Bénigne Bossuet, Historique I, 11.)
    Tous ces présents, Albine, irritent mon dépit. — (Jean Racine, Brit. I, 1.)
    Quoi qu’il en soit, Néron, d’aussi loin qu’il me vit, Laissa sur son visage éclater son dépit. — (Jean Racine, ib.)
    Crois que dans son dépit mon cœur est endurci. — (Jean Racine, Androm. II, 1.)
    Que vous importe, ô dieux, sa joie ou son dépit ? — (Jean Racine, ib. II, 5.)
    Entre amants tel dépit n'est qu’une bagatelle ; Je veux dès aujourd'hui vous remettre avec elle. — (Jean-François Regnard, Ménechmes, IV, 4.)
    Ces paroles le remplissaient de dépit contre Mentor. — (François de Salignac de la Mothe Fénelon, Tél. VII.)
    Il laissa tomber sa lyre de dépit. — (François de Salignac de la Mothe Fénelon, ib. VIII.)
    Les divisions, les dégoûts, les dépits ne peuvent y avoir aucune entrée. — (François de Salignac de la Mothe Fénelon, ib. XIV.)
    Pour faire dépit au maître des choses. — (Voltaire, Taur. 3.)
    Croyez-moi, ces dépits que l’orgueil vous déguise, Sont partout dangereux et surtout à Venise. — (Ducis, Othello, I, 6.)
  2. Se couper le nez pour faire dépit à son voisin, se nuire pour une vengeance qu’on n'obtient même pas.
  3. On dit qu’une chose croît par dépit, quand elle croît sans qu’on en prenne aucun soin.
  4. En dépit de, loc. prép. Malgré.
    Adieu ; fais lire au prince, en dépit de l’envie, Pour son instruction, l’histoire de ta vie. — (Pierre Corneille, Cid, I, 3.)
    Mais lorsqu'en dépit d’eux on en a voulu d’autres […] — (Pierre Corneille, Hor. III, 5.)
    Des cheveux assez, pour ne point porter perruque ; j'en ai beaucoup de blancs, en dépit du proverbe. — (Paul Scarron, Portrait de Scarron fait par lui-même.)
    Je vous l’avais prédit qu’en dépit de la Grèce De votre sort encor vous seriez la maîtresse. — (Jean Racine, Androm. III, 8.)
  5. Figuré et familièrement.
    Faire une chose en dépit du sens commun, du bon sens, etc. la faire très mal.
    Tes écrits, il est vrai, sans art et languissants Semblent être formés en dépit du bon sens. — (Nicolas Boileau-Despréaux, Sat. II.)
    Ils ont l’air d’être faits en dépit de l’art. — (Denis Diderot, Salon de 1767, Œuvres, t. XV, p. 5, dans POUGENS.)
  6. En dépit qu’on en ait, c’est-à-dire quoi qu’on fasse.
    Quelquefois en dépit que j'en aie. — (René Descartes, Médit. 2.)
    J'ai caché si longtemps l’ennui qui me dévore Qu'en dépit que j'en aie enfin il s’évapore. — (Pierre Corneille, Pulch. II, 1.)
    J'ai beau voir ses défauts et j'ai beau l’en blâmer, En dépit qu’on en ait, elle se fait aimer. — (Molière, Mis. I, 1.)
    Il faut que je lui sois fidèle en dépit que j'en aie. — (Molière, D. Juan, I, 1.)
    Je me sens pour vous de la tendresse en dépit que j'en aie. — (Molière, l'Av. III, 5.)
    Ah ! vous y resterez, en dépit qu’on en ait. — (Jean-François Collin D'Harleville, Vieux célib. IV, 10.)

Mots apparentés

TraductionDéplier / Replier